(Blanche-Neige et les Sept Nains)

          Un animal est avant tout... un animal ! Et dans beaucoup de productions, les animaux restent... et bien des animaux. Par exemple dans Blanche-Neige et les Sept Nains, la jeune princesse a beau sourire aux oiseaux, aucun ne prendra le parole. Ils restent cependant très utiles pour faire le ménage. Si la princesse Aurore réessaye 22 ans plus tard, c'est toujours avec si peu de succès (et cette fois-ci les animaux de la forêt ne font même plus le ménage !). Heureusement, Cendrillon a trouvé la parade: un bonnet, un Tee-shirt et des chaussures et voici les souris de la maison Trémaine transformées en personnages secondaires dignes de ce nom. En effet, pour développer davantage l'histoire de Cendrillon et permettre une adaptation de plus d'une heure d'un conte de quelques pages, les scénaristes ont imaginé une intrigue parallèle centrée sur les péripéties des souris Jack et Gus affrontant le redoutable chat Lucifer.

          Il est vrai que les personnages secondaires dans les films d'animation revêtent souvent une dimension comique. C'est par exemple le cas du Crocodile dans Peter Pan, animé par Wolfgang Reitherman et Cliff Nordberg. Ayant avalé un réveil matin en même temps que la main du Capitaine Crochet, le reptile, qui ne rêve que de goûter à nouveau au tendre Capitaine, annonce son arrivée par un "Tic Tac" désormais célèbre... de quoi assurer des séquences hilarantes au chef d'œuvre de 1953. Les animaux ont un capital sympathie essentiel à exploiter pour "détendre l'atmosphère" dans des histoires parfois trop sérieuses ou trop sombres. On retiendra dans ce cas Sébastien et Polochon de La Petite Sirène, Abu et Iago dans Aladdin, Mushu dans Mulan ou plus récemment Pascal dans Raiponce. Malheureusement, si l'intrigue est déjà particulièrement comique, la surdose est toute proche, ainsi le cheval d'Hercule, Pégase, aurait certainement gagné en noblesse avec plus de discrétion...

(Le Crocodile de Peter Pan)

Avec un tel pouvoir de séduction, certains animaux, pourtant au second plan dans leur film, ont réussi à devenir de véritables institutions. Jiminy Criquet, révélé dans Pinocchio en 1940, est aujourd'hui l'un des principaux représentants de l'univers Disney aux côtés de la Fée Clochette. La conscience du petit pantin de bois imaginé par Carlo Collodi est animé dans le long-métrage par Ward Kimball, qui de façon étonnante ne trouvera jamais son personnage totalement abouti. Il est vrai que Jiminy, selon les directives de Walt Disney lui-même, ne ressemble plus beaucoup à un insecte à la fin des recherches graphiques: quatre pattes au lieu de six, plus d'antennes ni d'élytres, un abdomen inexistant... et pire que tout le Criquet marche debout sur ses pattes arrières tel un être humain ! Et pourtant, les spectateurs accueillent l'adorable Jiminy avec enchantement. La carrière de l'orthoptère est lancée: Jiminy reviendra sept ans après dans le grand classique Coquin de Printemps et dans une série télévisée "Je suis prudent avec..." diffusée lors du Mickey Mouse Club. Pinocchio a permis la naissance d'une autre star, Figaro. A l'inverse de Jiminy Criquet, le chat animé par Eric Larson démontre une fidélité étonnante avec la réalité. Privé de la parole, Figaro réussit malgré tout à s'imposer, aussi bien lors de scènes comiques ou émouvantes avec son maître, Gepetto. Adopté par le public, la carrière post-Pinocchio de Figaro est elle aussi détonante. Promu chat officiel de Minnie, on retrouvera le félin facétieux dans trois cartoons de Pluto, mais aussi dans sa propre mini-série de courts-métrages: Figaro et Cleo (1943), Gai... Gai... Baignons-nous (1946) et Figaro et Frankie (1947).

          Certains autres animaux, s'ils ne sont pas devenus aussi célèbres que Jiminy ou Figaro, ont réussi à captiver l'attention du spectateur bien qu'ils apparaissent assez peu de temps à l'écran. On pense ainsi aux pingouins serveurs de Mary Poppins, que l'on retrouve régulièrement en character dans les parcs Disneyland ou dans la série télévisée Tous en Boîte. De même, et encore plus surprenant, les personnages animés de Mélodie du Sud, tout droit sortis de l'imagination de l'Oncle Rémus, bénéficient d'un traitement incroyable dans les parcs d'attraction. La célèbre attraction Splash Mountain, dupliquée dans trois sites différents, est entièrement consacrée aux aventures de Monsieur Lapin et ses amis... et les personnages sont régulièrement de sortie dans les parcs à thème. Difficile à croire dans ce contexte que Mélodie du Sud soit une œuvre très peu connue, surtout par le public français qui n'en retient qu'une vieille édition VHS...

(Basile et Boniface dans Mélodie du Sud)

(Dumbo, l'éléphant volant)

          Rapidement, les animaux prennent le pouvoir dans les longs-métrages d'animation de Disney. Dès 1941, les studios présentent le grand classique Dumbo. Après les gros blockbusters que furent Pinocchio et Fantasia, le premier grand classique dont le personnage principal est un animal paraît bien modeste: un budget minimaliste de 812 000 $ et une petite année et demi de production ont été nécessaires pour porter à l'écran la tendre histoire de l'éléphanteau aux grandes oreilles. Rejeté par ses semblables, Dumbo, animé avec brio par Bill Tytla, devra compter sur son ami Timothée pour révéler son véritable potentiel. Le résultat est à couper le souffle, et contrairement à ces deux prédécesseurs, Dumbo est un grand succès encensé par la critique, une véritable bouffée d'air frais. Et oui, le petit éléphanteau a littéralement écrasé Mickey et ses balais... qui l'aurait cru ? Surtout que Dumbo est l'un des rares héros Disney totalement muet ! Il n'y a plus aucun doute, les animaux sont capables de porter un long-métrage vers les sommets !

          Malgré la présence d'humains, ce sont bien les animaux qui sont les vedettes de leurs films. Plusieurs chefs d'œuvres de l'animation sont ainsi portés par des personnages hauts en couleurs. Dans La Belle et le Clochard (1955) d'Hamilton Luske, Clyde Geronimi et Wilfred Jackson, la jolie cocker Lady s'amourache de Clochard, un bâtard vivant dans la rue. Dans Les 101 Dalmatiens (1961) d'Hamilton Luske, Clyde Geronimi et Wolfgang Reitherman, la portée de 15 chiots de Pongo et Perdita a été kidnappée par la perfide Cruella, qui veut s'en faire un manteau de fourrure. Dans Le Livre de la Jungle (1967) de Wolfgang Reitherman, Mowgli est adopté par les loups de la jungle. Mais Sher Khan, le tigre mangeur d'hommes rôde à nouveau... Mowgli est alors confié à la panthère Bagherra qui a pour mission de conduire le petit garçon dans un village d'hommes. Enfin, dans Les Aristochats (1970), de Wolfgang Reitherman (encore !) Duchesse et ses trois chatons sont enlevés par le majordome Edgar afin d'empocher l'héritage fabuleux qui leur est destiné.

(Haut: La Belle et le Clochard, Bas: Les 101 Dalmatiens)

(Volt, Mitaine et Rhino dans Volt, Star Malgré Lui)

           Les années qui suivent son également riches en grand classiques "animaliers": on retiendra Les Aventures de Bernard et Bianca (1977), Rox et Rouky (1981), Oliver et Compagnie (1988) et Bernard et Bianca au Pays des Kangourous (1990). En 2003 les studios PIXAR arrivent avec leur ras-de-marré Le Monde de Némo, d'Andrew Stanton. Le petit poisson clown et les récifs de Sydney sont rapidement remplacés par le rat Rémy et les égouts de Paris dans Ratatouille (2007) de Brad Bird. Entre temps, les studios Disney délivrent des œuvres assez décevantes, telles La Ferme se Rebelle (2004) ou The Wild (2006). La dernière production "animalière" en date est Volt, Star Malgré Lui (2008), la troisième tentative des Walt Disney Animation Studios dans le domaine de l'animation 3D. Sans être un chef d'œuvre, le résultat est prometteur et le film se révèle être l'un des plus réussis de ces dernières années. Volt est un héros très attachant et attendrissant, dont le voyage initiatique à travers les Etats-Unis est un vrai plaisir à suivre. Au design à la fois simple et soigné, le petit chien parvient à capter l'attention du spectateur sans le moindre effort.